La solitude de l’écrivain
Nous associons souvent les activités créatives à des activités solitaires. Peindre, écrire, dessiner, composer, c’est coucher sur le papier ou sur la toile des idées qui n’appartiennent qu’à nous.
Le travail créatif peut se faire seul, en groupe, mais à son origine il y a toujours une envie personnelle, unique.
Aujourd’hui je voulais parler de la solitude de l’écrivain, qui est souvent résumée à celle de l’artiste devant son ordinateur ou devant ses feuilles. Et je ne suis pas d’accord. Il y a plein de formes de solitude en tant qu’artiste et personnellement je ne la ressens pas forcément pendant mes séances d’écriture.
La solitude dans l’écriture
Bien sûr, je l’ai déjà vécu. Quand on est seul devant sa feuille, que l’inspiration est là, mais que les mots ne coulent pas de source. Qu’on se sent bête. Qu’on ne veut pas en parler. Qu’on a honte. Que toutes nos idées fourmillent dans notre tête, mais qu’on n’y arrive pas.
Alors oui, écrire des histoires est une activité solitaire, mais le sentiment de solitude c’est autre chose. C’est dans ce genre de moment qu’on est dur avec soi-même. Que de toute façon ça n’en vaut pas le coup. Qu’il vaut mieux se tourner vers des activités collectives car ce sera moins difficile. Que ce sentiment sera moins prégnant.
Je ne peux pas dire que j’ai beaucoup souffert de cette solitude à l’écriture. J’ai eu des doutes et quand je ne croyais pas en une histoire je l’abandonnais. J’en ai abandonné beaucoup . Jusqu’à il y a très peu de temps.J’ai eu la chance d’avoir des bêta lectrices en or, très engagées qui m’ont soutenu. Sans elles, je n’aurais pas osé aller aussi loin. Je n’aurais pas osé publier. Je ne me serais pas sentie légitime (même si c’est difficile).
La solitude dans ses rêves
Je suis plus sujette au sentiment de solitude dans les rêves. Pas mes rêves quand je dors, mais ceux que je vois pour moi. Pour ma vie. Pour ce que je veux faire. Pour ce qui me passionne.
Après l’élan de la première publication, je me suis demandée si c’était possible. Si je pouvais en faire quelque chose. Une vie concrète.
Je me suis sentie seule avec ce rêve un peu fou. Je me sens d’ailleurs toujours seule quand j’y pense. Car ce rêve n’engage que moi. Car mes proches ont peur. Car je n’ai pas le courage de tout quitter pour me lancer. Car si ça ne marche pas, je n’aurais que mes yeux pour pleurer.
Je me sens seule chaque matin quand j’allume mon ordinateur pour travailler pour quelqu’un d’autre que moi. Parce que je sais que cette situation ne me convient pas. J’ai toujours été indépendante et ce sentiment étrange, latent, qui dure depuis des années, n’a trouvé son explication que récemment. Ce n’est pas la faute de mon employeur. Que ce soit celui-ci ou un autre, ce sera pareil. Je ne me sens pas à ma place dans le monde des entreprises. Pas comme ça.
J’ai la chance d’être plutôt déterminée ce qui m’aide à garder la tête hors de l’eau.
Mais je me sens quand même seule quand je parle de mon rêve. On me dit : “oui, oui, c’est un beau projet” puis on passe à autre chose.
Et j’en viens à la solitude la plus difficile.
La solitude dans son entourage
Qui ne s’est jamais senti seul quand il parlait d’un projet à ses proches, à ses copains, à ses collègues ?
On dit souvent qu’avoir un bon entourage est important pour réussir dans la vie. Et je ne peux qu’appuyer ce point. L’entourage est essentiel.
Les phrases du type “Oui, oui c’est un beau projet”, “c’est difficile”, “tu y penseras quand tu gagneras assez d’argent”, “n’oublie pas que tu as un crédit ou un loyer à payer”, sont difficiles à vivre. Elle sapent le moral. Elles nous font nous sentir seul. Très seul. Elles sont terribles. Comme si tu étais sur une planche de surf sur une grosse vague de détermination et que l’océan t’engloutissait. Tu dégringoles. Tu te trouves nul. Tu te dis qu’ils ont raison, que ça ne sert à rien, que c’est difficile. Que tu peux te contenter de ton job même si tu n’y trouves aucun sens.
Que la réussite dans ce genre d’activités c’est pour les autres. Tu te dénigres, tu vas au fond du trou et puis tu en sors. Tu te dis que s’il ne suffit que d’une personne pour te soutenir, ce sera toi-même et que c’est bien suffisant.
Tu comprends aussi qu’ils ne se rendent pas compte de l’impact que leurs mots peuvent avoir sur toi (tu leur parles de ton rêve et de tes projets, tu te mets à nu c’est normal d’être blessé) et surtout qu’ils projettent leurs propres angoisses sur toi.
Bien sûr que tu n’es pas une tête brûlée. Que tu ne te lanceras pas “comme ça” et si tu le fais, fais-le à fond, mais pense bien aux conséquences quand même. La seule chose que tu veux, c’est du soutien. Qu’ils croient en toi. Qu’ils te disent que c’est possible.
Juste ça : c’est possible, tu peux y arriver.
Comment lutter contre cette solitude ?
Mais vu que je ne suis pas du genre à me laisser abattre et que j’ai pour principe que “OK tu touches le fond, tu as le droit pendant un jour ou deux, mais ne les laisse pas abîmer tes rêves”, je ne me laisse pas faire. Je lutte contre cette solitude.
Et le premier point essentiel pour moi est le suivant : ne pas hésiter à en parler.
Ce n’est pas simple de montrer sa fragilité. Ce n’est pas simple d’oser dire que ça ne va pas. Ce n’est pas simple d’en vouloir à son entourage qui sape le moral sans s’en rendre compte.
Ce n’est pas simple d’y croire tous les jours. Ce n’est pas simple de s’en sortir. Et verbaliser ce mal-être peut être un combat de tous les instants.Mais tu as le droit d’en parler. Tu as le droit de dire que tu te sens seul. Que tu attends un peu plus de soutien, parce que le soutien c’est essentiel. C’est avoir des personnes qui seront là et qui croiront en toi même le jour où tu as une baisse de régime. Alors verbalise. Explique. Dis leur ce que ça te fait. Pleure si tu veux. Réfléchis, mais parle.
Souvent une discussion peut faire des miracles. Et si ce n’est pas le cas, au moins tu auras essayé.
Autre idée qui n’est pas forcément évidente, mais si tu en arrives à ce stade, c’est que tu as essayé d’en parler et que tu sais que malgré toute la bonne volonté de ton entourage, tu ne pourras pas oublier ce sentiment de solitude : celle de t’entourer de personnes comme toi.
Des auteurs, des entrepreneurs. Il ne faut pas croire, mais il y a un sacré nombre de personnes qui vivent la même chose que toi, que moi. Et il n’y a qu’eux qui peuvent nous comprendre vraiment. Qui passent par les mêmes étapes, les mêmes doutes, les mêmes sentiments.
Entoure-toi. T’entourer d’auteurs ne veut pas dire te détourner de tes proches, au contraire, je trouve finalement ça plus sain. Tu enlèves cette pression que tu mets à ton entourage, tu diminues tes attentes et tu te concentres sur ton projet en en discutant avec des personnes qui te ressemblent et qui ont déjà vécu ces moments de doute.
Bénédicte
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